
La méthode Franck ©
La méthode PDCA (Planifier, Déployer, Contrôler, Agir) semble plus adapté dans les domaines de la productivité industrielle et commerciale que dans le domaine social, car il ne s'agit pas seulement de planifier, mais aussi de permettre à la personne de s'approprier le processus. Dans le cadre de l'amélioration continue dans le milieu social, nous avons réalisé qu'il était nécessaire de développer un outil plus adapté, prenant en compte les étapes d'appropriation par les professionnels ou les personnes concernées.
Malgré son caractère obligatoire, nous avons constaté que certains aspects de la prise en charge étaient moins investis car les professionnels n'y trouvaient pas de sens. Par exemple, la charte des droits et libertés, document obligatoire depuis la loi du 2 janvier 2002, est souvent intégrée au livret d'accueil ou à d'autres documents transmis à la personne, mais elle ne devient pas nécessairement vivante dans l'accueil effectif de la personne. Pourquoi cela ? Comment pouvons-nous faire en sorte que les accompagnants y trouvent du sens et puissent s'en saisir ?
Nous proposons une méthode qui favorise l'appropriation en permettant à la personne de trouver du sens et de développer des automatismes. Cela permet d'intégrer de nouveaux outils à leur pratique et d'accompagner les personnes de manière plus efficace. En devenant des acteurs privilégiés de l'amélioration continue de leur établissement, ils repensent leur pratique et les éléments qui y sont associés de manière différente.
La méthode Franck© ou le cycle de développement des compétences et des méthodes d’accompagnement
est une méthode à visée socioconstructiviste qui se compose de cinq étapes :
La première étape : Créer un environnement favorable à l’apprentissage et la compréhension
Cette phase initiale vise à approfondir l'analyse du sujet traité pour en comprendre pleinement les enjeux et les éléments essentiels. Elle implique une réflexion, un sens, des liens et une mise en pratique à travers une anamnèse.
L'intervenant doit ajuster sa méthode pédagogique et son discours en fonction du niveau de compréhension de chaque apprenant, ce qui demande du temps et de la patience. Il est crucial de réduire le stress pour maintenir un environnement bienveillant et propice à l'apprentissage. L'intervenant peut également relier les nouveaux éléments à d'autres concepts pour renforcer la compréhension et faciliter la mémorisation, contribuant ainsi au développement d'un raisonnement pratique.
Il est indispensable de ne pas se cantonner à l'explication théorique, mais également de mettre en relation les notions enseignées avec leur application concrète, ce qui leur confère du sens. De plus, il est essentiel de fournir un résumé synthétique des points clés et de proposer des pistes pour approfondir ses connaissances sur le sujet, si l'apprenant le souhaite.
Cette première étape se répète à chaque nouvel arrivant dans le programme d'apprentissage. Il est également nécessaire de connaître les participants afin de leur permettre de trouver du sens dans leur apprentissage. Prendre le temps d'expliquer et d'illustrer les concepts favorise une dynamique propice à l'échange et à la compréhension.
La seconde étape : Optimiser les outils et les pratiques pour rendre concrets les éléments identifiés en fonction des ressources actuellement disponibles.
Cette seconde étape vise à établir des liens entre les nouveaux éléments identifiés et les outils ou concepts mobilisés précédemment. Cela permet de rendre ces éléments transposables et de renforcer le sens donné ou trouvé lors de la première étape. À ce stade, plusieurs possibilités s'offrent : adapter les pratiques existantes en les améliorant ou créer de nouveaux outils répondant aux nouvelles attentes. Chaque phase sollicite la créativité de manière différente : si la première phase l'utilise pour donner du sens, cette deuxième phase l'emploie pour confirmer l'utilité en mobilisant les supports ou habitudes existants de manière différente. Quant à la troisième phase, elle se concentre sur la rendue plus pratique.
Ainsi, cette phase deux représente un moment crucial où l'on ajuste ou modifie les pratiques afin de les améliorer en vue de mieux répondre aux attentes identifiées.
La troisième étape : Faciliter l'accès et l'utilisation des éléments retravaillés afin de les rendre pratiques et favoriser l'acquisition d'automatismes.
Cette troisième étape vise à rendre les nouveaux outils accessibles et pratiques, renforçant ainsi leur utilité et favorisant le développement d'automatismes. Cette phase privilégie la fonctionnalité en tirant parti de la créativité. Il est possible d'introduire des changements tout en conservant un souci de performance, de fonctionnalité et de praticité. En assurant cette préoccupation, les individus seront en mesure d'utiliser de manière instinctive les nouveaux éléments. Le travail préparatoire effectué en amont vise précisément à faciliter cette étape, qui se veut facilitatrice. Néanmoins, il est important d'avoir des rappels sur le sens initial donné aux outils, afin que les automatismes ne détournent pas l'idée originale apportée par le changement. L'automatisme ne doit pas conduire à la monotonie ; il doit favoriser l'efficacité tout en étant remis en question pour maintenir une dynamique d'amélioration continue.
La quatrième étape : Évaluer l'efficacité des changements et l'appropriation par toutes les parties impliquées.
Logiquement, cette quatrième étape introduit l'évaluation. Celle-ci revêt une importance capitale pour évaluer la pertinence des moyens déployés et l'impact qu'ils ont pu avoir sur l'ensemble des parties prenantes. Il est judicieux d'impliquer l'ensemble des parties prenantes dans cette évaluation, qui se doit d'être facilement compréhensible et d'avoir une durée préalablement définie. Il est préférable que cette étape soit coconstruite afin de favoriser une participation active.
En plus de l'évaluation de l'efficacité, il est également pertinent de prendre en compte le bonheur engendré par les changements et leur impact sur le climat social. En effet, même si cela n'est pas directement lié à la productivité, il est crucial, lorsqu'on travaille avec l’Autre, d'évaluer l'impact de chaque nouvel élément sur son bien-être. Un environnement bienveillant et épanouissant est tout aussi essentiel que les critères de performance.
La cinquième étape : Favoriser l'amélioration des pratiques en fonction de l'efficacité des changements, en tenant compte des retours des parties prenantes.
Cette dernière phase vise à poursuivre l'amélioration continue des outils et des concepts utilisés tout au long de cette méthode. Une amélioration efficace intervient de manière préférentielle après un état des lieux. Contrairement au PDCA, cette méthode suit un cercle vertueux différent : la méthode Franck© doit être réinitialisée à chaque fois qu'il y a un changement majeur dans le dispositif. La recherche de sens constitue une étape essentielle qui conditionne les suivantes. Que ce soit une nouvelle réglementation, un renouvellement de personnel ou un changement dans le public accueilli, il est impératif de recommencer cette méthode à zéro afin de ne laisser personne de côté et de maintenir la construction collective.
Dans cette optique, les domaines d'amélioration peuvent être divers. Il est cependant préférable de se rapprocher du concept du triangle QCD, qui vise à trouver l'équilibre entre la qualité, le coût et la durée. Le financement peut également avoir un impact significatif sur la qualité des services offerts, influant à la fois sur le temps que les personnes responsables peuvent y consacrer et sur la qualité des prestations en général.
Les améliorations peuvent faire l'objet d'expérimentations afin d'évaluer les bénéfices de ces changements. Il est important de maintenir une dynamique réflexive autour de l'amélioration des pratiques et de la qualité de l'accompagnement. Par extension, la qualité des conditions de travail des accompagnants entre également en ligne de compte. Tout comme l’évaluation cette phase doit être limité dans le temps afin de pouvoir relancer la boucle, et avancer dans les pratiques de manière constructive.
William FRANCK, directeur d'agence et créateur de la méthode.
